< dialogue entre moi et mon double, deux anges, face à une caméra >
Dialogue entre moi et mon double, deux anges, face à une caméra :
— J’ai toujours eu l’inceste en moi.
— Comme un double.
— Une ombre.
— Comme un châtiment.
— Comme une suspicion intransigeante.
— J’ai semé à la fin les semances d’acrylique.
— Perforées.
— Bues sans marc.
— L’aura désastreuse des porteurs d’eau.
— Peine s’enfuit.
— La rascasse aux abois se tord.
— Ordonne et meurt dans d’infinies souffrances.
— Je suis né un 7 juillet.
— Le matin, le soir j’étais ailleurs.
— J’ai été introduit au démon par un frère.
— Oncle utérin, ton symbole m’échappe.
— Je n’avais jamais pensé que l’oubli fait oublier ce qu’on a oublié.
— N’existe pas ce que je ne vois.
— Existent mes fantasmes.
— Mais qu’en est-il.
— Un violeur.
— Un oncle utérin.
— Un double.
— Qu’est-ce qui se joue.
— S’est joué.
— Que s’est-il passé.
— Que devra-t-on dire pour être conforme à ce qu’il s’est passé.
— Se passe.
— S’est-il passé quelque chose.
— Quel dispositif mettre en place.
— Un roman policier, une enquête journalistique.
— Un roman, une enquête scientifique.
— Un livre de DeLillo, mes yeux révulsés dans un espace clinique et vaporeux blanc.
— Qui suis-je.
— C’est quoi être.
— Que dis-je lorsque dis qui je suis.
— L’impensé.
— La détermination.
— Le penser.
— Ce qui m’est arrivé m’est-il arrivé.
— La mémoire.
— Que veux-je.
— Le réel n’existe pas.
— Seule la littérature.
— J’existe, mais ne suis pas.
— Serai.
— A partir de ce qui ne m’est pas arrivé.
— De la trace.
— De la transcendance posant sa marque au fin fond de la chair.
— C’est privé.
— Des sujets, des espaces, des positions égrénées dans le public.
— C’est entre moi et moi, coquille.
— Par moi seul peut être.
— Non déterminé.
— Mais me déterminant.
— Des mains invisibles sur ma gorge jusqu’à en vomir.
— Trop fumé.
— Des liquides par ma gorge.
— Tout liquide.
— Métaphysiquement liquide.
— Perdu.
— Qui suis-je.
— Que serai-je.
— Dans l’enfer du sujet, quel caillou.
— Un jour je serai.
— Il faut commencer à vivre.
— Se construire.
— Détermination, imitation.
— Des murs où projetées les ombres des suppliciés.
— Des massacres dans la nature, du rouge, du noir, leurs ombres sur un mur blanc la nuit.
— Des millions de cadavres, nus, maigres, cireux, empilés au bord d’une route, au bord d’un champ, au petit matin.
— J’existe mais ne suis pas.
— Etre, à partir de ce que je ne suis pas.
— Ne m’est pas arrivé.
— Contre-nihilisme.
— Etre.
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Mesdames et messieurs, le nouveau, le grand, le sublime ROMAN est arrivé. Le voilà pour vous ce soir, pour le plaisir des sens, et pour le plaisir des yeux. Le grand roman de l’ÊTRE est enfin arrivé. Vous vous êtes toujours demandé comment l’on devenait ce que l’on devient, et bien voici pour vous, mesdames et messieurs, une réponse ce soir, en chair et en os, sur la scène du grand châpiteau. Voici venir Aldo, le clown avec son petit chapeau ridicule, son faux nez en trompette et son large sourire blanc dans laquelle loge une mince bouche triste, Aldo avec ses pantalons qui tombent et ses trop grandes chaussures, Aldo le célèbre clown, qui va interpréter, pour vous ce soir, mesdames et messieurs, le roman de l’Être. Voici donc sans plus attendre, mesdames et messieurs, le ROMAN DE L’ÊTRE, ou comment être ce que l’on n’est pas à partir de ce que l’on n’a jamais été.
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